La table de chef qui fait rimer solidarité et rentabilité

Le restaurant d’insertion de 200 places est situé dans l’ancien Café parisien quelques pas du Vieux-Port. © Robert Poulain

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              Le République, le restaurant solidaire de Sébastien Richard  ambitionne de réunir  tous les Marseillais dans un même lieu grâce à une tarification classique et une à 1€ symbolique. Décryptage avec le chef de ce projet audacieux qui fait des émules !

Propos recueillis par Alexianne Lamy.

Restauration 21 : Présentez-vous  le République, ce lieu hybride qui a pour slogan « Mon restau est ton resto » ?

Sébastien Richard : Le République propose différents univers répartis sur 1200m² : un restaurant bistronomique, une table privée gastronomique, un bar cocktail et tapas, un boulodrome, bientôt une table autour de l’éveil des sens ainsi qu’hors les murs un foodtruck actif à la belle saison. Tous ont le même ADN : réunir autour d’une expérience des personnes différentes. Celles qui ont les capacités financières pour dépenser entre 10 et 100 € et les autres personnes qui ne dépenseront qu’1€.

Qui sont les bénéficiaires du repas à 1€ ?

Tous ceux qui en ont besoin, momentanément ou non. Pour ce faire, nous passons une convention avec des associations locales telles les Femmes du plan d’Aou, une association qui vient en aide à des personnes démunies ou encore l’Écurie, une prépa médecine gratuite pour les étudiants des quartiers Nord. Ce sont elles qui procèdent ensuite aux réservations pour leurs bénéficiaires. Dès lors, quand ces derniers arrivent au République, ils sont déjà identifiés dans notre carnet de réservation et bénéficient en toute discrétion du même service, de l’accueil au passage en caisse.

Quelle structure est derrière le République ?

Le République est entièrement porté par La Petite Lili, une association que j’ai fondée et qui se donne deux objectifs. D’une part, permettre une mixité sociale permettant à des personnes qui n’ont pas la possibilité de venir dans un restaurant. D’autre part, permettre la formation et la transmission des savoirs via l’employabilité de personnes en parcours d’insertion ou en apprentissage. Aujourd’hui, nous avons 29 salariés dont 14 en parcours d’insertion et 15 en droit commun aux côtés de bénévoles dont je fais partie. Dans cette optique, nous allons ouvrir en 2024 une école de formation aux métiers du CHR à Marseille avec une première session dès cette année !

Comment avez-vous réussi à monter un tel projet solidaire ?

Nous avons des acteurs qui nous ont suivis dès l’origine du projet. Le bailleur du lieu, le fonds d’investissement Primonial, a accepté de nous octroyer un loyer minoré. Pour l’investissement de 900 K€, nous avons bénéficié d’une subvention et de mécénat à hauteur de 25-28%, le reste est un crédit que la Société Générale a accordé à la Petite Lili. Nous avons également négocié des tarifications auprès de notre fournisseur d’électricité Engie et pour les denrées alimentaires, auprès d’acteurs locaux tels Gusto Market et des Jardins de Jeannot ou nationaux tels Transgourmet et Metro. Enfin, nous avons fait appel à la société Quiétalis qui a réussi à nous équiper à hauteur de 25% en matériel reconditionné.

Quelle part représente les offres à 1€ dans l’activité générale du République ?

Actuellement, les offres à 1€ représentent environ 30 % de l’activité en prenant en compte certaines de nos prestations extérieures dont des repas pour des œuvres caritatives. Nous espérons voir ce pourcentage progresser dans les mois à venir, l’essentiel étant que l’équilibre financier soit là ! 10 % du montant des additions servent à financer les repas à 1 €. Pour notre premier exercice, nous avons fait 800 K€ de chiffre d’affaires avec une perte de 100 K€. Aujourd’hui, nous sommes presque à l’équilibre et nous le serons à la fin de l’année, le tout sans recevoir aucune subvention de fonctionnement.

Peut-on espérer voir d’autres Le République ouvrir prochainement en France ?

De nombreuses personnes sont venues nous solliciter pour développer le lieu. Pour ce faire, nous avons mis au point une charte qui repose sur le principe du partenariat mais qui impose des conditions strictes. Deux nouvelles structures vont ainsi ouvrir dans les prochains mois dont une à Aubagne, en partenariat avec le groupe La Varappe. J’espère ainsi voir Le République éclore dans de nombreuses villes françaises et montrer que ce modèle de restaurant solidaire et d’insertion est possible.

A retrouver dans sa version intégrale
dans le Magazine #9 de Restauration21
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