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08/07/2024

Le don des invendus se professionnalise en restauration collective

©Restauration21

Obligatoire pour les cuisines produisant plus de 3 000 repas par jour, le don des surplus alimentaires est peu pratiqué. Le futur label antigaspi pourrait le remettre dans le jeu.

Cet article a été publié dans le Magazine #12 de Restauration21 (mai 2024).

Niché au fond d’une cour située dans le quartier Pasteur à Fontenay- sous-Bois (94), un bâtiment bas abrite le petit bureau-salon d’Excellents Excédents et ses chambres froides. À l’intérieur de celles-ci : les composantes de repas, produites en surplus et conditionnées en barquettes, d’une trentaine de cuisines centrales d’Île-de-France. Depuis sa création en 2016, l’Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale poursuit un objectif : proposer un service de repas issus de l’antigaspi avec la même qualité que celle offerte aux convives initiaux. Du lundi au vendredi, dès 9 heures du matin, ses 3 véhicules réfrigérés sillonnent les routes de la périphérie parisienne pour collecter auprès des donateurs entrées, plats, desserts, fruits frais. De quoi composer dans la foulée 450 repas complets destinés aux bénéficiaires des 7 receveurs récurrents, principalement des associations d’aide alimentaire mais aussi des cantines et épiceries solidaires, et les leur livrer dans le strict respect des conditions d’hygiène. Soit 100 000r epas sur un an sur 2023, un chiffre en progression de 59 % par rapport à 2022 et un équivalent de 226 tonnes de CO2 évitées selon l’Ademe.

« Nous nous sommes engagés auprès de nos receveurs à leur livrer un nombre précis de repas, nous avons donc besoin de volumes pour y parvenir, explique Anne Tison, cofondatrice avec Pierre Ravenel d’Excellents Excédents, s’il nous manque des denrées, nous les achetons ». « Nous ne donnons pas ce qui ne sera pas consommé, le but étant de ne pas faire de transfert de biodéchets vers les receveurs », insiste-t-elle.

Les 24 donateurs – des cuisines centrales en autogestion ou des SRC – produisent entre5 000 et 50 000 repas par jour. « Après 7 ans, on évalue entre 0,3 % et 1 % le gaspillage réalisé au niveau des cuisines centrales, poursuit Anne Tison. En 2023, nous avons collecté 50 tonnes d’excédents de plats préparés [entrées, plats, accompagnements, fromages, desserts] auprès de nos 24 donateurs, majoritairement des cuisines centrales. Cela représente 1,5 fois plus de quantité qu’en 2022. »

Transfert de responsabilité

Grâce à un outil informatique interne, les portions collectées sont allouées à la composition des repas en fonction des contraintes alimentaires des bénéficiaires (recettes végétariennes). Sur sa tablette, Anne Tison suit en temps réel l’adéquation entre les dons, les repas à fournir et les repas complets assemblés, l’assemblage étant le point clé de l’exercice.

« Il faut réussir à recomposer des repas parfaitement équilibrés à partir d’excédents aléatoires. Il y va de l’équilibre nutritionnel des bénéficiaires de l’aide alimentaire ».  À15 heures, c’est le départ. Les véhicules repartent chargés des caisses de repas, toutes identifiées par un code-barres. La signature électronique du bordereau renseignant la traçabilité sur du produit et l’enregistrement des températures associées lors de la collecte garantit le transfert de responsabilité entre le donateur et Excellents Excédents et ensuite entre Excellents Excédents et les receveurs lors de la livraison.

Gratuit pour les donateurs, le service est facturé aux receveurs en fonction du nombre de repas livrés, du nombre de composantes et de l’existence ou non d’une livraison. « Nous ne nous rémunérons pas sur la défiscalisation des donneurs. Il s’agit d’associer une valeur au travail nécessaire pour collecter, assembler et livrer ces repas ».

Pour élargir les débouchés, Excellents Excédents travaille à la création d’une cantine solidaire antigaspi à Fontenay-sous- Bois sur le modèle de Rest’Auber qui sert des repas à 3,50 €, 5 jours sur 7 depuis 2018 à Aubervilliers (93) et où les personnes les plus précaires peuvent bénéficier d’un repas gratuit sur orientation des services sociaux.

« Même si la loi les y oblige, toutes les cuisines centrales qui produisent plus de 3 000 repas par jour ne donnent pas leurs surplus aux associations caritatives pourtant en manque de denrées » constate Didier Girard, ingénieur restauration en établissement de santé.

« Effectivement, le don n’est pas [leur] sujet prioritaire, celles-ci étant plus préoccupées par les coûts des matières premières et l’application de la loi Egalim » renchérit Xavier Corval, président d’Eqosphere. Comment mieux intégrer les préparations non consommées dans les dispositifs de redistribution pour le jour même ? « En formant les équipes sur les plans opérationnel et réglementaire, assure-t-il, la clé réside dans leur adhésion à l’enjeu de la réduction du gaspillage ».

Diagnostic exhaustif

Attendu initialement pour le 2e semestre 2024, le label d’État antigaspillage (lire encadré) qui sortira finalement au cours du premier semestre 2025 labellisera les cuisines centrales parvenues à réduire de 50 % leur gaspillage (par rapport à 2015), une obligation de la loi Agec. Pour elles, une démarche s’impose : « réaliser un premier diagnostic exhaustif pour quantifier les surplus, mettre en place des actions et refaire un diagnostic pour constater et évaluer l’efficacité des actions et les gains » poursuit Xavier Corval. Eqosphere propose son expertise aux collectivités en abordant l’antigaspi dans sa globalité, les surplus en aval et la surproduction en amont, le but étant d’adapter au mieux les quantités produites au nombre de convives en identifiant les facteurs du gaspillage. « Or, l’hétérogénéité domine en termes de facteurs du gaspillage, ce qui complique sa réduction ».

De leur côté, Anne Tison et Pierre Ravenel mettent également leur expérience au service des sites de restauration pour, après une phase de diagnostic, identifier les leviers de réduction de pertes en amont et en aval. « Pour les offices, nous développons l’outil Green Menu, lauréat du dernier appel à projet du Plan National de l’Alimentation qui consolide les données collectées en indicateurs et graphiques et permet à un office de donner les surplus sans intermédiaire » précise la première

Pour lire l’article dans son intégralité, cliquer sur l’image 

 

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