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04/11/2024

Les buffets au défi de l’anti-gaspi

Au Novotel Paris Centre Tour Eiffel (XVe), Florence Bordas et Clément Proy scrutent l’approvisionnement des buffets. ©Nelly Rioux

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                             Les buffets ont toujours eu la cote auprès de la clientèle. Bien conçus, ils sont appétissants et participent à la fameuse expérience client.

Article écrit par Nelly Rioux et publié dans le Magazine #13 de Restauration21

Les convives raffolent des buffets, à volonté ou pas, synonymes d’autonomie, de choix et parfois d’excès. Résultat: des préparations à jeter en fin de service et des assiettes non terminées. Alors que la lutte contre le gaspillage devient un enjeu sociétal et que la pression inflationniste impose une gestion stricte des coûts matière, la formule est-elle à bout de souffle malgré de solides arguments commerciaux? Pour l’exploitant, le buffet nécessite moins de personnel qualifié et des solutions existent pour gérer les invendus (dons aux associations, vente à prix remisés). Des surplus néanmoins évitables que seule une gestion fine en amont peut réduire.

Cerner la demande

Les traiteurs organisateurs de réception maîtrisent depuis longtemps la formule. Lorsqu’ils préparent le devis d’une réception avec un buffet, ils étudient dans le détail le profil de la clientèle et le contexte de la réception. Ils connaissent le grammage des pièces et leur impact satiété sur l’appétit du convive. C’est leur expérience qui va permettre de proposer la meilleure composition pour qu’il ne reste rien même si, dans le cas d’une réception, le client paye une quantité définie au préalable qui n’oblige pas le traiteur à réapprovisionner le buffet. « Ce qui est primordial dans un buffet traiteur c’est de bien cerner la demande » confirme Claire Pennarun, directrice générale de Maison Pennarun installée à Quimper (29) et à Rennes (35). « Il y a des différences à plusieurs niveaux, à commencer par la localisation de la réception. On ne mange pas la même chose à Paris et en régions, les compositions diffèrent. La météo joue aussi un rôle, on mange moins lorsqu’il fait chaud. La nationalité, le sexe des convives sont aussi des données à prendre en compte et dans ce domaine, rien ne remplace l’expérience ».

Retrouvez tous les articles de la rubrique GASPILLAGE

Eviter de surproduire

Sous l’influence de sa directrice, Maison Pennarun a mis en place très tôt une politique RSE qui inclut la gestion des surplus alimentaire lorsqu’il y en a. « Mais surtout nous travaillons pour éviter de surproduire » indique Claire Pennarun qui regrette cependant la multiplication des régimes spéciaux, devenus incontournables, mais qui pénalise cette action. « On est obligé de multiplier les productions pour satisfaire tout le monde. Nous devons produire plus pour être sûr que chacun y trouvera son compte ». Avec ses clients fidèles, Maison Pennarun analyse d’une réception à une autre ce qui a bien marché et réoriente si besoin la composition du buffet, en quantité et en qualité pour viser le zéro surplus. « Les entreprises y sont de plus en plus sensibles et nous avons alors un vrai rôle de conseil à jouer ».

L’enjeu des petits-déjeuners

Du côté des hôtels, le buffet petit-déjeuner est scruté. Le Novotel Paris Centre Tour Eiffel (XVe) fait figure d’exemple. Il y a 3 ans, la direction a mis la RSE au cœur de ses priorités et l’hôtel est désormais Clef Verte. 65 % des clients de ce gros-porteur (764 chambres et 3000 m² de salons) prennent le petit-déjeuner aux buffets du restaurant Greem et dans les salons «Groupes ». Pour réduire le gaspillage alimentaire, Clément Proy, responsable RSE, accompagne les équipes de la restauration dans l’organisation et le déroulement du service. Le succès de cette démarche repose sur la coordination entre les différents services qui travaillent pour assurer une gestion efficace des ressources. « C’est grâce à l’implication de chacun que nous avons atteint une première baisse du gaspillage alimentaire » confie-t-il. Dès que l’affluence diminue, les buffets de la salle réservée aux groupes sont transférés vers le Greem. « Cela nous permet de diminuer l’approvisionnement des buffets une fois le rush passé et ainsi réduire le gaspillage » explique-t-il. Il a aussi travaillé sur les contenants, « avec une préférence pour des bacs ½ gastro sur les chafing dish ou des plateaux plus petits pour présenter certains pains. Des contenants plus petits ou moins profonds donnent une impression de volume alors qu’ils contiennent en réalité moins de denrées ». Au moment du service, il est en salle pour s’assurer que les consignes sont appliquées et que la communication salle/cuisine est fluide.

Production à la demande

Florence Bordas qui supervise la RSE au sein de l’établissement ajoute: « Nous étudions les prévisions d’occupation de la semaine puis nous ajustons au jour le jour en fonction du nombre de clients pour passer les commandes de denrées. Nous avons choisi quelques produits qui se préparent à la commande comme les viennoiseries pré-poussées à cuire au fur et à mesure. Des animations en salle permettent de préparer les œufs à la demande. Avant, on surproduisait en début de service pour ne pas manquer et ne pas se faire déborder par l’affluence. Maintenant, nous sommes dans une démarche de sous-production en début de service puis de production sur demande de la salle. C’est une collaboration entre les cuisiniers et la salle et c’est un changement important, souvent difficile à accepter au début. Mais nous avons constaté des résultats très positifs ». Elle a créé en début d’année un comité RSE pour sensibiliser les équipes, « et ça marche plutôt bien ». Deux balances connectées dotées d’IA ont été installées début mai pour mesurer le gaspillage en identifiant les produits jetés. « Maintenant, nous oscillons entre 10 à 15 kg de déchets alimentaires par jour, c’est très encourageant! Mais il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir ». L’établissement a été pilote en 2023 dans le cadre du référencement AccorInvest de deux systèmes (Winnow et Orbisk) destinés à mieux mesurer les biodéchets en identifiant les produits jetés grâce à une caméra. Reste les événements Banqueting où le gaspillage alimentaire est encore trop important. Des axes d’amélioration sont en cours de réflexion. « Les entreprises deviennent sensibles à la notion du gaspillage et la solution pour le limiter est peut-être d’envisager une rétribution ou un geste commercial pour les encourager à moins gaspiller! »

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