18/11/2024
Titre-restaurant : les syndicats de la restauration et du commerce alimentaire de détail opposés au projet de loi
TRIBUNE – Catherine Querard , Présidente du GHR Thierry Marx, Président confédéral de l’Umih, Romain Girard, Président du Snarr, Joël Mauvigney, Président de la CGAD et Dominique Anract, Président de la CNBPF, dénoncent la pérennisation de la dérogation permettant l’achat de tout produit alimentaire en grande distribution avec le titre- restaurant.
Dans le cadre de la Proposition de loi visant à prolonger la dérogation d’usage des titres restaurant pour tout produit alimentaire.
Alors que la réforme des Titres-restaurant engagée cette année par le gouvernement avec les professionnels a été interrompue du fait de sa démission, nos organisations représentatives des secteurs de la restauration et du commerce alimentaire de détail sont scandalisées que des parlementaires veuillent, sans la moindre concertation, pérenniser la dérogation permettant l’achat de tout produit alimentaire en grande distribution.
À travers la Proposition de loi visant à prolonger la dérogation d’usage des titres restaurant pour tout produit alimentaire (n° 532) et ses 22 amendements, certains parlementaires oublient que cette dérogation temporaire ne peut plus se justifier par le contexte de hause des prix (5,2% en 2022) qui a prévalu à sa mise en oeuvre. Désormais l’inflation est de 1,1% sur un an. Au demeurant, cette dérogation constitue un transfert de possibilité de dépense, pas du tout un gain, en pouvoir d’achat pour les Français.
Pire, avec la pérennisation de cette dérogation, ces parlementaires affaiblissent encore plus des dizaines de milliers de restaurateurs et de commerçants de détail (boulangers, charcutiers traiteurs…) qu’ils sacrifient – espérons sans le savoir – dans l’intérêt de la grande distribution.
Les chiffres de la Commission Nationale des Tires Restaurants sont éloquents. La part des titres restaurant dépensée dans la grande distribution a augmenté de 7,7 points, entre le 4ème trimestre 2022 et le 2ème trimestre 2024 passant de 22,4 % à 30,1 %. En valeur absolue, cela constitue un manque à gagner de 747 millions d’euros sur cette période, et au moins 1 milliard jusqu’à aujourd’hui.
En deux ans la grande distribution a donc gagné plus d’un milliard d’euros de recettes en titres restaurant au détriment des restaurateurs et des commerces alimentaires de détail.
Quelle France veulent-ils pour demain ? Une France de grands distributeurs, plutôt qu’une France des restaurateurs et des commerçants et artisans de bouche animant les centres-villes et créant de la richesse économique, sociale et culturelle ?
Ces professionnels des métiers de bouche sont aujourd’hui dans une situation de grande fragilité financière. Ils restent tenus par le remboursement de PGE alors que leur activité ralentit et que leurs charges d’exploitations se sont envolées : prix des matières premières, de l’énergie, de la masse salariale.
À titre d’exemple, la marge des restaurateurs est aujourd’hui, selon l’Observatoire Fiducial, de seulement 3 % de leur résultat. Les défaillances d’entreprises se multiplient : elles ont augmenté de 20 % dans la restauration au 3ème trimestre 2024 par rapport à 2023.
Enfin, ces parlementaires doivent savoir qu’en pérennisant cette dérogation, ils dévoient le titre restaurant de son objet premier (acheter un repas) et compromettent son statut de titre spécifique de paiement justifiant son exonération de charges sociales et fiscales. La Cour des Comptes l’a pourtant rappelé au printemps 2024.
Toutefois, parce que nous sommes responsables et conscients de la volonté des salariés de continuer à bénéficier de la facilité d’usage des titres restaurant qu’apporte cette dérogation, les professionnels proposent aux parlementaires et au gouvernement une solution de compromis satisfaisante pour tous : prolonger d’un an la dérogation à la condition d’instaurer d’un double plafond de paiement journalier en titres restaurant, à raison de 15€ en grande surface pour faire ses courses et notamment celles nécessaires à la préparation de ses repas et de 25€ dans la restauration et dans les commerces alimentaires de détail.
Un double plafond de paiement journalier permet de flécher une partie des titres restaurant vers la restauration et ainsi de préserver leur objet initial.
Enfin, un double plafond sécurise l’exonération de charges des titres restaurant tout en évitant de fragiliser les restaurants et les commerces de détail tout en laissant aux détenteurs de titres restaurant la liberté de choix, soit aller au restaurant, soit acheter des produits alimentaires non immédiatement consommables frais leur permettant de cuisiner leurs repas, notamment les jours de télétravail.
Confédération Générale de l’Alimentation en Détail (CGAD) ;
Confédération Nationale de la Boulangerie et Boulangerie-Pâtisserie Française (CNBPF) ;
Groupement des Hôtelleries & restaurations de France (GHR) ;
Syndicat National de l’Alimentation et de la Restauration Rapide (SNARR) ;
Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH).
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